•  Stevan Markovic, l'affaire qui a failli compromettre les Pompidou

    22 septembre 1968... L'ancien garde du corps d'Alain et Nathalie DELON, Stevan MARKOVIC monte dans une voiture en plein Paris où semblait l'attendre un autre homme ; le Yougoslave ne sera retrouvé que quelques jours plus tard, le 1er octobre, dans une décharge sauvage à Elancourt, une banlieue éloignée des Yvelines, avec une balle de 6.35 dans le thorax que l'on ne localisera qu'au terme d'une deuxième autopsie, la première ayant été trop vite réalisée. Le cadavre sera retrouvé enveloppé dans une housse de nylon et un sac de jute et le décès de MARKOVIC remonterait à la nuit du 22 au 23 septembre. Méconnaissable, il ne sera identifié que grâce à des empreintes digitales car l'homme de 31 ans était déjà fiché auprès des autorités pour s'être trouvé mêlé à plusieurs affaires. D’après l’autopsie, la mort remonterait au 22 septembre et aurait été causée par divers coups portés par un « objet contondant, volumineux et pesant ». Une bagarre qui aurait dégénéré, selon les autorités. Grâce à son frère Alexander, les enquêteurs qui avaient tout d'abord cru à une bagarre de truands, s'orienteront vers tout à fait autre chose. En possession de lettres de Stevan montrant que l'intéressé était inquiet pour sa sécurité, les enquêteurs approcheront aussitôt le couple DELON et l'ami du couple, un certain François MARCANTONI un gangster corse demeurant avenue des Gobelins à Paris. Sur les champs de courses où il attendait la fortune, MARKOVIC avait sollicité l'amitié de ce dernier qu'il avait rencontré à une reprise chez les DELON. Sans doute a-t-il alors voulu franchir le seuil des petites combines et s'est-il frotté à des gens du milieu qui ont dû jouer un rôle dans sa disparition et son assassinat. Ces lettres en possession de son frère qui mettaient en cause l'acteur vaudront d'ailleurs à Alain DELON d'être interrogé sans attendre à propos de son employé, qu'il aurait « rejeté de sa vie », notamment à cause de sa « personnalité envahissante » et de son « comportement inacceptable »

    Stevan Markovic, l'affaire qui a failli compromettre les PompidouPassé clandestinement en France à 20 ans, Stevan MARKOVIC, fils de famille, était un adolescent attardé et un jeune homme vivant de son seul charme et de minables expédients. Quelqu'un auquel Alain DELON avait assuré une sorte de raison sociale en le prenant comme doublure et en lui procurant un logement. Cette situation lui permettait de parader devant son clan et de "tomber" les midinettes. Seulement, l'amitié... En conflit avec les DELON, à la suite d'une liaison du Yougoslave avec Nathalie, l'affaire de son meurtre prendra vite une autre tournure dès le week-end de Toussaint suivant, la rumeur enflant démesurément. Une rumeur qui compromettra même Claude, l'épouse du futur Président, Georges POMPIDOU avec des questions de plus en plus nombreuses surgissant au fil de l'enquête et des rebondissements qui raviront la presse à scandale. On prétendra que ce François MARCANTONI aurait dîné avec les POMPIDOU chez Alain DELON avenue de Messine et que tout ce petit monde se fréquentait. Des photos auraient même été prises par le dénommé MARKOVIC. La chose était tout à fait possible car le play-boy yougoslave était déjà connu pour avoir organisé des orgies sexuelles et avoir tenté de faire chanter d'autres personnalités qui avaient participé à certaines parties fines du même type. 

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    Mais d'autres questions plus délicates pour le célèbre acteur finiront par surgir, questions qui lui vaudront d'être mis en garde à vue juste après le tournage de La piscine. Lorsqu'il était encore employé par les DELON, Stevan MARKOVIC avait-il couché avec Nathalie, la maîtresse de maison et avait-il menacé de révéler cette liaison autour de lui ? Et avait-on voulu l'empêcher de parler en chargeant quelqu'un comme le gangster François MARCANTONI de le faire taire en l'éliminant ? L'affaire sera appelée à devenir une véritable affaire d’État, lorsque des rumeurs impliqueront Claude POMPIDOU en s'attardant effectivement sur le fait que sur des photos détenues par le Yougoslave, elle apparaissait désignée sur les documents avec un surnom, celui de "Madame Premier". Claude POMPIDOU aurait également participé à une partie fine organisée en 1966 à Montfort-L'Amaury, une petite fête qu'on hésitera cependant à rapporter à son époux déjà préoccupé par d'autres enjeux depuis qu'il avait cessé ses fonctions de Premier Ministre en juillet 1968 et que les Gaullistes battaient un peu froid. Certains ne lui pardonnaient pas d'être un gaulliste historique et il lui était reproché de n'avoir pas rejoint la France libre pendant la Seconde Guerre mondiale, ni d'avoir mis de l'ordre dans les services du SDECE lors de l'affaire Ben Barka. Le garde des Sceaux, René CAPITANT, mentor des gaullistes de gauche et ennemi personnel de l'ex-directeur général de la Banque Rothschild le tenait pour responsable de la « chienlit » de mai 1968. D'autres enfonceront le clou. Un cliché pour le moins surprenant circulera rapidement de main en main représentant la compagne de Georges, futur 19e président de la République, dans une position pour le moins coquine puisqu'on la voyait pratiquer une fellation. De là circulera aussitôt une rumeur : le couple POMPIDOU aurait été friand d'échangisme et de “festivités sexuelles”, comme le relatera le magazine Vanity Fair. Derrière ce ragot se cachait en fait une histoire d’argent sale et de meurtre. Mais aurait-il été possible que de fausses informations, voire des photos pornographiques fabriquées de toute pièce circulent dans Paris, visant, au travers d'une épouse, Georges POMPIDOU, l'ancien Premier ministre de Charles de GAULLE ? Il s'avèrera qu'il s'agissait finalement d'un montage photographique qui n'avait été produit que pour nuire au couple POMPIDOU, le visage d’une actrice ayant été remplacé par celui de Claude POMPIDOU. Dans l’histoire de la politique française, il est clair que l'épouse de l'ancien Premier Ministre aura été avec cette histoire la victime de l’une des plus effroyables calomnies. Les langues pendues auraient-elles voulu qu'il y ait une seconde Madame Claude ? On pourrait se poser la question. Sur un plan politique, il se dira aussi que si les événements de mai 1968 avaient déjà fragilisé la relation entre Georges POMPIDOU, alors Premier ministre, et le Général de GAULLE, cette affaire n'arrangera rien.

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    Auditionné à plusieurs reprises le couple DELON, que les enquêteurs pensaient coupables, ne sera pas inquiété. Finalement, François MARCANTONI prendra pour tous les autres et sera arrêté le 16 janvier 1969 pour complicité d’assassinat avant d'être écroué puis finalement blanchi puisqu'il obtiendra un non-lieu et qu'il sera relâché en 1976. En avril 1969, une perquisition à son domicile de Goussainville, en Eure-et-Loir, avait été diligentée ne permettra pas de retrouver les housses d’un sommier et un matelas livrés en juin 1968, dont le modèle correspondait à l’emballage qui avait servi de linceul au corps de MARKOVIC. En dépit d’éléments troublants, les charges retenues contre François MARCANTONI seront donc jugées insuffisantes. A noter que l'avocat Roland DUMAS qui n'était pas encore en politique sera chargé de représenter la famille MARKOVIC durant le procès de François MARCANTONI. Le gangster corse dira avoir donné au juge le nom de celui qu'il soupçonnait, un Corse également qui se faisait appeler François et dont la bande avait un litige à propos d'un trafic de cocaïne avec le clan des Yougoslaves auquel MARKOVIC appartenait. Mais cette histoire rocambolesque qui ne livrera jamais de coupable sinon des suspicions inspirera à André CAYATTE un film : Il n'y a pas de fumée sans feu avec Annie GIRARDOT, Mireille DARC, Michel BOUQUET et Bernard FRESSON. Bravant (non sans difficultés) la censure, le réalisateur parviendra à sortir un film au synopsis sans équivoque : « Pour se débarrasser du Docteur De Peyrac, son concurrent direct lors des élections municipales, le maire sortant s'emploie à salir la réputation de sa femme en l'accusant de s'adonner à des orgies. »

     

     

     

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  • Karl Hanke, le bourreau romantique amoureux de Magda "la chienne"

    Karl Hanke, le bourreau romantique amoureux de Magda "la chienne"

    A l'été 1938, après que ce preux chevalier des âmes en détresse eut partagé quelques balades à cheval avec l'intéressée et qu'il lui eut conté fleurette, il aura été l'un des derniers amants de Magda, la chienne, et sans doute aussi l'un de ceux qui, habilement manipulé par la gente dame (ci-dessous), croyait pouvoir un jour parader au bras de celle qui était devenue la "Première Dame du Troisième Reich". Mais après le divorce de celle-ci avec Joseph GOEBBELS, et en admettant que leur Führer ait permis cette séparation définitive après 1938, et d'accepter que son propagandiste devienne ambassadeur nazi au Japon, le serait-elle resté ?

    Secrétaire d'une cellule nazie en 1928, HANKE (photo en tête d'article), qui avait prévu d'être minotier gravira très vite les échelons pour devenir chez les S.A. responsable d'une section à Berlin sous les ordres du Gauleiter Joseph GOEBBELS. Puis, en 1932, directeur de l'organisation du Gau, assistant personnel et conseiller du futur ministre de la Propagande. C'est lui qui prendra contact avec le jeune architecte qu'était alors Albert SPEER pour la transformation d'une villa de banlieue en bureaux dévolus à une section du NSDAP. Les deux hommes deviendront assez vite des amis. Apprécié pour son élégance et sa franchise, Karl HANKE deviendra député au Reichstag en 1932 et GOEBBELS en fera son attaché au Ministère de la Propagande du Reich avant que lui soit confié en 1938 un poste de Secrétaire d'Etat. 

    Karl Hanke, l'amant chevaleresque éconduitCette montée dans la hiérarchie subira temporairement un coup d'arrêt à la suite d’un imbroglio sentimental dans le couple de son ministre direct puisqu'il prendra fait et cause pour l'épouse de celui-ci, Magda GOEBBELS (photo de gauche) qui se servira de l'admiration que lui portait HANKE pour en disposer comme d'un jouet. Au gré de de ses besoins de perverse narcissique. Lassée des infidélités de son mari, notamment avec l’actrice tchèque Lida BAAROVA, elle lui fera miroiter quantité de promesses qu'elle n'honorera cependant pas. Dans son ouvrage : Magda, la chienne du Troisième Reich, que nous avons publié chez Decal'Age Productions éditions, Louis PETRIAC revient sur cette affaire et sur ce qui ressemble à un véritable acharnement de l'égérie nazie. Puisqu'après avoir accepté le soutien de cet homme durant l'été 1938, et avoir fait du cheval en sa compagnie au sens propre et non au sens figuré, elle le trouvera subitement trop simple et trop rigide, ne le voyant plus comme elle le voyait encore jusque-là !

    Devenu Gauleiter de Breslau en Silésie en 1941, grâce surtout à GOEBBELS qui avait voulu l'éloigner d'une épouse girouette portée sur le chaud et le froid, la carrière de cet "élégant nazi" s'achèvera sur un comportement loin d'être celui d'un homme chevaleresque, puisqu'il sera responsable d'une tuerie et de la mort d'un millier de personnes, ce qui fera de lui un bourreau, le bourreau de Breslau. Une province où, après s'être enfin marié avec une baronne, il mènera pendant une grande partie du conflit un grand train de vie. On dira aussi de ce nazi chevaleresque avec les dames, qu'il était têtu, arrogant et brutal jusqu'à la cruauté. Ce qu'il démontera lorsque Breslau devenue une forteresse aura à résister à l'Armée rouge. Pendant 77 jours, l'armée soviétique de pointe encerclera la forteresse et HANKE nommé par HITLER "commandant de la bataille" (Kampfkommandant) supervisera, avec fanatisme, la défense militairement inutile et futile d'une ville promise à la mort comme il avait sans doute choisi de l'être. HITLER en fera le 20 avril 1945 le successeur d'Heinrich HIMMLER à la tête de la SS après avoir appris la trahison de son "fidèle Heinrich". C'était bien le moins entre futur suicidaires ! Une promotion dont HANKE, en fuite, ne sera jamais informé et dont il ne profitera donc pas. Le 8 mai 1945, il sera abattu par un garde tchèque après avoir tenté de fuir d'un camp où il avait été auparavant emprisonné en Tchécoslovaquie le 29 avril.

     

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  •  Laure Moulin avait parlé de la mort de son frère Jean

    Laure Moulin avait parlé de la mort de son frère JeanC'était en 1964 au moment du transfert des cendres du célèbre résistant au Panthéon et Laure MOULIN (ci-dessus), la soeur de Jean MOULIN avait évoqué au micro de France-Culture ce qu'elle savait de la disparition de son frère. Jean MOULIN avait été arrêté le 21 juin 1943 à Caluire dans la région lyonnaise et il serait mort le 8 juillet suivant dans un train en partance pour l'Allemagne où il aurait dû être déporté après avoir été torturé des jours et des jours par Klaus BARBIE. Bien que l'on ait dit qu'il avait été difficile d'authentifier les cendres de la dépouille de son frère, elle restait persuadée que l’urne 10 137 confirmait la crémation de son corps. 

    En septembre 1941, en zone libre, dans l’appartement familial montpelliérain, l’ex-préfet avait un temps hésité après avoir failli mourir à Chartres où torturé il avait tenté de mettre fin à ses jours. Pour continuer le combat contre les nazis, devait-il se rendre aux États-Unis ? C'est alors que Laure, 49 ans, lui avait suggéré l'idée de rallier l’Angleterre pour rencontrer celles et ceux qui luttaient encore en Europe. Leur relation privilégiée empreinte de complicité les aidera. Elle apportera dès lors son soutien à l'ancien préfet, puis s’engagera à ses côtés, apportant une aide indispensable à son action dans la Résistance intérieure. La paix revenue, la résistante, comme la plupart de ses consœurs, ne s’était pas irritée du peu de reconnaissance accordée au combat de cette Résistance souvent meurtrie. Inutile de dire qu'elle avait suivi avec attention le procès à Paris de René HARDY qui passe toujours pour être celui qui aura livré Jean MOULIN aux nazis. Ce qui était également le sentiment du secrétaire de l'ancien préfet puisque Daniel CORDIER, interrogé avant son décès l'an passé, avait cependant regretté que des archives n'aient pu contribuer à éclaircir un dossier qui reste encore aujourd'hui non solutionné. « Son rôle est joué, et son calvaire commence. (…), il atteint les limites de la souffrance humaine sans jamais trahir un seul secret, lui qui les savait tous. » Cette phrase qu'a prononcé MALRAUX en 1964 lors de la panthéonisation de Jean MOULIN n'est pas de lui, mais de Laure qui œuvrait alors inlassablement dans l'ombre pour la postérité du frère héroïque et vénéré qu'elle avait perdu vingt-et-un ans plus tôt.  

    Plus âgée de sept ans que son frère, Laure MOULIN qui avait elle-même été résistante, est décédée le 31 décembre 1974 après lui avoir consacré un ouvrage qui sera publié en 1982. Un livre d'autant plus passionnant qu'il éclaire une époque, celle de la guerre froide, et que son auteure était prête à s'arranger avec les réalités honteuses du passé. Jusqu'à son décès elle avait travaillé, en gardienne infatigable de la mémoire du résistant, à la reconnaissance de l'ampleur de l'action de son frère, et donc à sa panthéonisation.

     

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  • 21 juin 1943... L'arrestation de Caluire

    Soixante-dix-huit ans après les faits, l'Histoire n'a pas oublié Caluire ni ce triste 21 juin 1943 à quelques jours près. Parce que cette journée aura été marquée par le sceau de l'infâmie et par l'arrestation de l'un des représentants de la Résistance : Jean MOULIN. Simone BERTHET (en tête d'article) qui verra la scène se dérouler sous ses yeux s'en souviendra longtemps, elle qui était en poste à la mairie de la localité lyonnaise au moment de cette tragédie qui coûtera la vie à ce Max que tous les nazis recherchaient depuis des mois et des mois, et particulièrement leur chef, un certain Klaus BARBIE.

    L'étau s'était resserré peu de temps après l'arrestation à Paris le 9 juin 1943 du Général DELESTRAINT, qui était le chef de l'Armée Secrète voulue par le général de GAULLE. Cette organisation était un maillon indispensable en vue de l'organisation d'opérations armées clandestines. Il devint donc indispensable que Jean MOULIN réunisse au plus vite l’état-major de cette Armée Secrète pour lui désigner sans attendre un successeur, et plus qu'un successeur un homme qui jouirait de la reconnaissance de l'ensemble de la Résistance française, ce qui n'était visiblement pas le cas de l'ancien préfet d'Eure-et-Loir. Il est d'ailleurs probable que si MOULIN n'avait pas eu à gérer autant d'oppositions, jamais il n'aurait jamais été trahi comme il l'a été en juin 1943. Et pas seulement par le seul René HARDY même en admettant que celui-ci ait pu être floué par la maîtresse du nazi STENGRITT dont le cheminot était tombé amoureux, la dénommée Lydie BASTIEN ! André LASSAGNE, engagé au sein du mouvement Libération Sud, avait été chargé de trouver un lieu dans la région lyonnaise et ce sera son ami, le docteur Frédéric DUGOUJON qui acceptera de lui prêter la maison qu'il occupait à Caluire et où il avait aussi son cabinet médical pour que puisse se tenir dès 14 heures 30 cette réunion. Idéalement située hors de Lyon elle se trouve sur la discrète place Castellane au centre du bourg et personne n'aurait pu imaginer ce 21 juin 1943 que l'on y vivrait ce qui s'est passé.

    En cette matinée du lundi 21 juin 1943. Jean MOULIN, alias "Max", quitte la petite chambre qu'il occupe sous une fausse identité, au 2 de la place Raspail présumant que cette journée sera longue et ­mouvementée. D'autant que le 27 mai précédent, il a présidé à Paris une réunion fondatrice, celle du Conseil national de la Résistance (CNR). Le CNR rassemblait alors tous les groupes armés, toutes les sensibilités politiques et syndicales, en vue de préparer la France d'après guerre, sous l'autorité du général de GAULLE. Mais, derrière une unité de façade, les rivalités et les jalousies perdurent en ce début d'été. Seulement trois des responsables convoqués par MOULIN connaissent l'adresse du rendez-vous de Caluire, une mesure prise à titre de précaution. Deux événements imprévus vont modifier le scénario initial et mener à l'arrestation de Jean MOULIN.

    21 juin 1943... L'arrestation de Caluire

    A 13 h 40, André LASSAGNE attend au départ du funiculaire qui mène au sommet de la colline de la Croix-Rousse, en direction de Caluire. Il a rendez-vous avec Henri AUBRY du groupe Combat qu'il doit conduire à la réunion. Mais là, surprise, AUBRY n'arrive pas seul. Il est accompagné d'un autre cadre de son mouvement : René HARDY (photo ci-contre), le chef du réseau de sabotage Fer, qu'il a fait venir pour que les intérêts de Combat soient mieux pris en compte lors de la réunion en l'absence de Guillain de BENOUVILLE parti sur Toulouse se marier. HARDY n'a pas été invité par Jean MOULIN et sa présence est contraire aux règles élémentaires de sécurité et de cloisonnement des informations qui ont été décidées par toutes les parties. Elle est d'autant plus contraire qu'AUBRY n'a pas cru utile de prévenir à l'avance Jean MOULIN alors que les deux hommes s'étaient vus le matin même du 21 juin. S'il l'avait fait, il est probable que l'ancien préfet aurait pris la précaution de déplacer la date de la réunion. D'ailleurs, HARDY alias "Didot" semble particulièrement nerveux. Les trois hommes se présentent chez DUGOUJON vers 14 h 25 et ils sont conduits au premier étage. Cependant, aucun d'entre eux n'a, semble-t-il, remarqué qu'une jeune femme, arborant un corsage rouge, les suit à distance depuis le départ du funiculaire. Son nom : Edmée DELETTRAZ. Edmée est agent de liaison au sein d'un service de renseignement britannique actif en France occupée et elle a été arrêtée par la Gestapo le 16 avril précédent alors qu'elle était en mission à Lyon. Agent double depuis, elle a été totalement dépassée par les événements car il avait été prévu qu'elle indique à Klaus BARBIE où devait avoir lieu la réunion des Résistants. Ce qu'elle fera en leur indiquant tout d'abord un mauvais itinéraire et en tentant de prévenir les Résistants français sans avoir pu y parvenir.  

    Arrivés par la "ficelle" à la station Croix-Rousse, Jean MOULIN et Raymond AUBRAC constatent effectivement que le colonel SCHWARTZFELD n'est pas à l'heure. Il finira par arriver avec une demi-heure de retard et les trois n'arriveront à Caluire qu'à 15 heures au lieu de 14 heures 30. Ce qui changera tout car si les nazis étaient arrivés à l'heure au rendez-vous, avec son retard MOULIN n'aurait pas été arrêté. Au vu des événements les accusations se porteront rapidement sur celui qui n'aurait pas dû assister à cette réunion. D'autant que ce jour là le dénommé HARDY réussira à s'enfuir ayant été bizarrement mal menotté. On le lui reprochera du reste au cours des deux procès qui lui seront intentés en 1947 et 1950. Les interrogatoires musclés commencent. Les coups pleuvent, la Gestapo veut savoir qui elle a finalement attrapé et faire le tri entre patients et résistants. Les Allemands savent que Max est là, mais qui est-il ? Klaus BARBIE va livrer toute sa sauvagerie pour le découvrir. Lucie AUBRAC devait dîner avec son mari et MOULIN, ils ne la retrouveront jamais. Emprisonné et torturé à Lyon par BARBIE et ses sbires, Jean MOULIN ne flanchera jamais, gardant le silence et se refusant à trahir ses compagnons de combat. Il tentera même de se suicider en se jetant dans les escaliers. Rossé et torturé, il mourra sur le chemin de la déportation le 8 juillet d'après. Pour François-Yves GUILLIN, le secrétaire de DELESTRAINT, Jean MOULIN a été "livré" par René HARDY, un agent double qui travaillait pour les Allemands et personne n'a agi pour sauver l'ancien préfet. Ce que confirment les affirmations d'un collabo du nom de MULTON qui avait rejoint le camp de BARBIE. La Résistance intérieure, décapitée et déstabilisée mettra plusieurs mois à se réorganiser.

    Dans un ouvrage publié chez Fayard sur la fin de sa vie, René HARDY jouera aux pleureuses estimant qu'il avait été diffamé et accusé par nombre de ceux avec lesquels il avait résisté face aux nazis. Ils seront du reste quelques-uns à prendre la plume pour revenir sur ce qui s'était passé le 21 juin 1943 à Caluire, avec des opinions souvent très tranchées. Klaus BARBIE lui-même, de sa prison, tentera de jeter le discrédit sur Raymond AUBRAC mais ce qui est certain c'est que le "Boucher de Lyon" était resté un fin manipulateur sur la triste fin de son existence de tortionnaire. Le reportage ci-dessous revenant sur sa traque et son "arrestation" en Bolivie le démontre.

     

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