Son nom ne revient pas souvent lorsqu'on évoque tous les tortionnaires qui auront œuvré autour d'Adolf HITLER pour rendre la vie impossible à tous ceux qui les croisaient. Et pourtant ! Pourtant Philipp BOULHER, avec sa tête de premier de la classe, sa physionomie d'universitaire tranquille et ses lunettes cerclées d'écaille, ainsi que son apparence réservée, fait partie de la nomenklatura nazie, notamment pour s'être illustré en qualité de Reichsleiter dans la mise en œuvre du plan T4 d'élimination des handicapés mentaux et physiques dès octobre 1939 et jusqu'en août 1941. Parce que, selon leur Führer, le nombre des malades mentaux avait atteint en Allemagne le chiffre alarmant des 300 000. BOUHLER s'impliquera largement dans les mises à mort par « euthanasie » à la fois en Allemagne et un peu plus tard à l'Est en collaboration avec l'un des médecins préférés du Führer, Karl BRANDT, Viktor BRACK et Léonardo CONTI, le responsable de la Santé. Certes, il arrivait parfois que certains cas spéciaux soient soumis à HITLER mais la plupart du temps on se bornait à exaucer les vœux ou les prophéties de celui-ci voire même en les devançant par zèle excessif. Ce monstrueux disciple du dictateur nazi sera donc chargé de toutes les personnes jugées indignes de vivre ou dont la productivité laissait à désirer et qui se révélaient être un poids économique pour la nation. Il est vrai que pour le Troisième Reich, « la guerre constituait le moment idéal pour se débarrasser des malades incurables ». Une liquidation silencieuse et impitoyable qui semblait ravir le maniaco-dépressif Joseph GOEBBELS. Ce qui était clair, c'est qu'on devait être en bonne santé pour le peuple et pour l'Etat ! Ben voyons donc !

Membres atrophiés, buste tordu et visage inexpressif… Un homme lourdement handicapé est assis sur une chaise, maintenu par la main d’un infirmier posée sur son épaule. A côté, un message machiavéliquement conçu, qui indique le coût de son maintien en vie : « Soixante mille Reichsmarks ». Un parallèle avec ce que perçoit un ouvrier rémunéré chaque mois 165 Reichsmarks. On notera que l'on s'est abstenu de faire figurer le coût mensuel du maintien en vie de cet handicapé mais que l'on aura effectué la multiplication, sans doute pour justifier un peu plus sa mise à mort. Honteux ! Il était évident que la mort qualifiée de miséricordieuse de malades héréditaires et incurables délivrerait de leur poids leur famille et, plus généralement, la communauté. Cinq mille enfants handicapés seront ainsi assassinés en deux ans ! Les familles s’interrogeront longtemps face à des motifs de décès incohérents comme ceux provenant des conséquences d'une péritonite alors que les jeunes patients avaient déjà été opérés antérieurement de l’appendicite… Tout cela avant que l’on remarque au-dessus des centres d’impressionnants nuages de fumée nauséabonde… 

Profondément antisémite, sorti de l'armée au grade de lieutenant après avoir été gravement blessé au front, il militera au terme du conflit de 1914-18 dans les rangs de l'association populiste de protection ethnique Deutschvölkischen Schutz und Trutzbundes qui le préparera aux horreurs qu'il commettra une fois devenu nazi. Car, fidèle parmi les fidèles dès 1921 et son entrée au NSDAP dont il sera le douzième adhérent, il en commettra quelques-unes multipliant les responsabilités qui lui seront confiées notamment après qu'il soit devenu membre de la SS. Avant de participer aux côtés d'HITLER à la tentative de putsch infructueuse de 1923, il avait été le rédacteur en chef du journal nazi Völkischer Beobachter et dirigé la Chancellerie du Reich qu'il organisera avant de la transmettre à Martin BORMANN, cela après avoir un temps dirigé la police de Munich. On le verra aussi à la tête du Bureau de Censure en 1936, ce qui tend à démontrer que l'homme était partout, peut-être pour se rapprocher encore un peu plus des sommets et de son Führer. Il siégera également au Reichstag en qualité de député de 1933 à 1945. Marié à Hélène dite Heli, qui avait elle aussi tapé dans l'œil du voyeur qu'était HITLER (ci-contre), il avait en mains toutes les cartes pour parvenir au plus haut de la pyramide. 

L'ancien subordonné du Führer tombé en disgrâce sera néanmoins déchu de ses fonctions le 23 avril 1945, et il sera arrêté par les Américains avec son épouse Hélène le 9 mai alors qu'il avait accompagné Herman GOERING dans ses dernières gesticulations. Ce qui lui sera difficilement pardonné. Incarcéré le 19 mai à Dachau, il profitera d'un instant d'inattention de ses geôliers pour se suicider en ingérant le contenu d'une capsule de cyanure. Son épouse le suivra dans la mort.