• Monsieur Bill, le loubard des années cinquante, aura la tête tranchée !

    Monsieur Bill aura la tête tranchée !

    Monsieur Bill aura la tête tranchée !

    Au début des années soixante, la guillotine ne chômait pas et il n'était pas rare qu'on y fasse appel pour trancher la tête d'un condamné. Georges RAPIN alias Monsieur Bill auteur d'un meurtre répugnant ne sera pas le dernier à avoir la tête tranchée, lui qui rêvait d'avoir un destin de gangster, et d'être un héros de série noire au point d'avoir organisé la médiatisation d'un personnage que reniaient les caïds de Pigalle ! Alimentant la presse populaire des faits-divers, l'homme aura longtemps éclairé les photographies de Détective et de France Soir en se présentant sous les traits de l'homme sulfureux qu'il se plaisait à camper, lui qui n'était pourtant qu'un fils à papa sans personnalité. Le magazine Détective lui consacrera d'ailleurs plusieurs couvertures dont celle publiée ci-contre.

    Mais, qui était exactement ce "Monsieur Bill" dont on parlait beaucoup au début des années soixante, même dans les cours de récréation et que les petits loubards admiraient ? Un malfrat ? Celui qu'il prétendait être ? Assurément ! Certains diront qu'il était fou et que c'était un retardé mental. Disons qu'à l'époque, Pigalle était le royaume des vrais hommes, des durs, des julots, des michetons en costumes à rayures et belles cravates qui, roulant en décapotable, partageaient leurs journées entre parties de cartes et belles filles. Issu d'une famille aisée, et reconnaissable à sa tête de gouape déjantée, Georges RAPIN n'avait pourtant pas le profil de ces individus manquant de tout qui auraient pu être fascinés par le crime et une vie dissolue, et qui auraient juré de se venger un jour de la société en devenant une figure du grand banditisme. Au fil des années, le caractère de l'enfant s'affirmera en fonction de la sollicitude dont on l'a entouré. Car lui, "Pinpin", l'enfant gâté d'une maman qui l'adorait, lui le fils unique d'un ingénieur et de parents qui ne savaient rien lui refuser, il avait tout ce que pouvait désirer un gamin : une existence dorée et tout ce que pouvait obtenir par ses caprices un adolescent manipulateur et turbulent. A l'école il se montrera un élève irrégulier, se plaignant de maux de tête, ou de fièvre subite pour ne pas aller en classe. A chaque fois ses parents seront aux cent coups, eux qui avaient déjà perdu un premier enfant. Le gamin avait même de la suite dans les idées, qu'on en juge ! A 5 ans, alors qu'il était au théâtre avec sa mère, il la forcera à partir à l'entracte car il n'y avait pas de bonbons. A 17 ans, après avoir été renvoyé de plusieurs lycées, l'adolescent commencera à travailler laborieusement. Ses parents tenteront de lui procurer un emploi dans une librairie, mais il sera mis à la porte de chez GIBERT JOSEPH, d'où il sera licencié pour avoir été surpris en train de manipuler une arme. Qu'à cela ne tienne, comme il voulait être le tenancier d'un bar pour être davantage dans la note, on lui paiera à son retour du service militaire le Bill's bar, puis un deuxième qu'il ne fera pas l'effort d'exploiter. Il prétendra lors de sa revente que le Bill's Bar ne marchait pas. Pour le consoler, on finira par lui offrir la Dauphine Gordini noire dont il avait besoin pour ses frasques et pour enlever ses danseuses ! Tout cela alors qu'il avait tout d'abord rêvé être comédien, ce qui l'avait amené avant de partir à l'armée à prendre des cours de comédie chez Madame BAUER-THEROND.  

    Monsieur Bill aura la tête tranchée !Arrêté pour un crime affreux, puis pour avoir commis un crime parfait qu'il avouera, l'homme ira jusqu’au bout de sa mythomanie en n'hésitant pas à s'attribuer la paternité de plusieurs autres crimes. Sans doute pour avoir l'air encore plus vrai et ressembler à ces hommes sans foi ni loi que l'on aurait pu craindre lorsqu'on les croisait. Interpellé le 4 juin 1959 par le commissaire Jean-Marie CHAUMEIL de la Première Brigade Territoriale dans le luxueux appartement familial du 209 boulevard Saint-Germain où il demeurait avec ses parents, il reconnaîtra après vingt-quatre heures d'interrogatoire, avoir tué Muguette THIREL dite Domino (ci-contre), une entraîneuse qu'il venait d'acheter à un dénommé STELLO, un souteneur du milieu de Pigalle. Lui reprochant de ne pas lui rapporter assez à lui le flambeur, d'autant qu'il venait de perdre deux millions d'AF aux cartes, il décidera de la tuer. Le corps de celle-ci, tout d'abord difficilement identifiable, sera retrouvé calciné par des promeneurs dans la forêt de Fontainebleau et l'autopsie réalisée démontrera que la jeune femme avait été abattue de cinq balles de 7,65 et que dix litres d'essence avaient été utilisés pour la faire disparaître. Ce sont les escarpins de couleur rose qui permettront de savoir que l'on avait affaire à cette même Muguette THIREL que l'on avait vue monter dans une voiture noire appartenant à un certain "Monsieur Bill" la veille. La violence du meurtre frappera les enquêteurs, sidérés par l'audace du meurtrier, qui avait tué la jeune femme à quelques mètres de la route seulement au risque d'être facilement repéré. Ce qui provoquera de suite une énorme médiatisation de l'affaire. A la sortie du cabinet du juge, après son arrestation, il lancera aux journalistes présents fier comme Artaban : « Merci, messieurs pour être venus aussi nombreux. Je dois être quelqu’un. Vous avez raison de prendre aujourd’hui vos clichés : c’est le plus beau jour de ma vie. » Les caïds de Pigalle eux prendront aussitôt leurs distances, estimant horrible qu'on ait pu tuer cette pauvre Muguette qui, blessée, vivait encore lorsqu'elle sera brûlée. 

    Guillotiné le 26 juillet 1960 dans le quartier des condamnés à mort de la Prison de la Santé, malgré la brillante plaidoirie de quatre de ses défenseurs dont un certain René FLORIOT, Monsieur Bill n'avait que 24 ans. Après être revenu sur ses aveux et sur les treize crimes dont il s'était accusé, désireux en prison de retrouver sa maîtresse Nadine, RAPIN mettra de la distance avec ce Monsieur Bill qui définissait chacun de ses actes. Reniant son personnage, Georges RAPIN se présentera en effet devant ses juges en jeune homme de bonne famille et comme un garçon qui aurait été perverti par de mauvaises fréquentations à Pigalle et donc injustement accusé. En revenant sur ses aveux, RAPIN accusera du reste un souteneur prénommé ROBERT d'avoir tué Dominique parce qu'elle le faisait chanter, et cela sous ses yeux. Les deux compères auraient convenu que RAPIN s'accuserait du crime le temps pour ROBERT de se mettre au vert. L'explication ne convaincra néanmoins personne. Les experts appelés à la barre décriront l'accusé, comme quelqu'un d'émotif, à la recherche d'émotions violentes et nourrissant un complexe d'infériorité. Il ne faudra qu'une demi-heure aux jurés pour le condamner à mort ! Ce dernier refusera cependant de se pourvoir en cassation et de faire appel de sa condamnation à mort qu'il reconnaîtra après coup être une reconnaissance du statut de caïd qu'il avait longtemps revendiqué en s'accusant au passage de crimes qu'il n'avait pas commis en dehors de celui de la jeune prostituée et d'un pompiste, Roger ADAM qui avait osé le traiter de "petit con". Exécuté par le bourreau André OBRECHT, celui-ci écrira dans ses mémoires à propos de son exécution : « Monsieur Bill a mis en scène lui-même son suicide légal. Il a coupé le col de son veston et de sa chemise. Et, à notre arrivée, il riait. Il riait mais devait être déçu de n'avoir personne pour l'interviewer et immortaliser son cabotinage.» L'homme qui rêvait de ressembler au caïd interprété par Jean GABIN dans l'extrait ci-dessous mourra à 24 ans.

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