• Marc Bloch, le capitaine résistant au pétainisme

    Marc Bloch, le capitaine résistant au pétainisme

    Né le 6 juillet 1886 à Lyon, Marc BLOCH reste l'un des plus brillants universitaires et historiens qui feront de lui un enseignant soucieux de s'appuyer sur le riche passé de son pays, pays qu'il défendra après avoir enseigné l'Histoire en intégrant la Résistance en 1942. Sans doute parce qu'il avait été choqué de voir les Allemands occuper la zone non occupée en novembre de la même année. Agrégé d'Histoire et de Géographie en 1908, il était reconnu dès son plus jeune âge pour avoir « de l’originalité et de la finesse » et « toute l’aptitude morale nécessaire pour remplir dignement les fonctions de l’enseignement ». il enseignera avant la Première Guerre mondiale aux Lycée de Montpellier puis d'Amiens. Incorporé dans l'infanterie il finira avec le grade de capitaine dans le service des Essences. Ses faits de guerre lui vaudront d'être décoré de la croix de guerre avec quatre citations puis de la Légion d'Honneur. En 1919, il sera nommé professeur d’histoire médiévale à la faculté de Strasbourg où il accomplira jusqu'en 1936, l’essentiel de son œuvre d’enseignant et de chercheur. En 1936, Marc BLOCH sera nommé maître de conférences d’histoire économique à la Sorbonne. Rédacteur aux Cahiers politiques de la France Combattante, il avait commencé à réfléchir aux réformes qu'il estimait nécessaire de conduire après la libération de notre pays. Spécialiste du Moyen Age, et considéré comme le rénovateur de la Science historique, son livre posthume Apologie pour l’histoire sera publié pour la première fois en 1949.

    Juif, il sera exclu de la fonction publique conformément à l’article 2 du décret du 3 octobre 1940 portant statut des juifs, mais il sera malgré tout « relevé de déchéance » pour « services scientifiques exceptionnels rendus à l’État français » (décret du 5 janvier 1941) et il pourra reprendre son enseignement à l’université de Strasbourg repliée à Clermont-Ferrand. Dès le début de la collaboration vychiste, il adhérera et contribuera à la création du réseau Combat d'Henri FRENAY et Berty ALBRECHT.

    Devenu l'un des chefs clandestins de l'organisation de Résistants Franc-Tireur pour la région lyonnaise, puis au sein des MUR (Mouvements unis de la Résistance), il sera arrêté à Lyon le 8 mars 1944 par la Gestapo, emprisonné au Fort Montluc et torturé par le "Boucher de Lyon" Klaus BARBIE et ses hommes. Le 16 juin, avec vingt-sept autres résistants, après avoir été emmenés à une trentaine de kilomètres de Lyon, il sera fusillé dans un champ aux côtés d'un gamin de seize ans tremblant et inquiet qui lui demandera avant qu'on les exécute : « Est-ce que ça fera mal Monsieur, et auquel il répondra : Mais non petit, ça ne fera pas mal ! » Il sera l'un des premiers touchés par les balles et il tombera en criant "Vive la France".

     

    Yahoo!

    votre commentaire
  • Stefan Zweig, révolté par le sort fait aux juifs, il se suicidera

    Réfugié au Brésil avec sa seconde épouse Elisabeth, l'écrivain et dramaturge juif autrichien Stefan ZWEIG (photo tirée d'un film qui lui a été consacré) se suicidera avec elle à Rio-de-Janeiro le 22 février 1942. Pacifiste convaincu, il aura le témoin de la fin d'un monde et il espérait qu'après sa mort, une nouvelle Europe libre et unie verrait le jour. Né le 28 novembre 1881 à Vienne en Autriche-Hongrie dans une famille juive, Stefan ZWEIG représentait l’élite viennoise de la fin du XIXe siècle. Son père, Moritz était un riche fabricant de textiles et sa mère, Ida appartenait à une longue lignée de banquiers. Il suivra des études au Maximilan Gymnasium, l'un des meilleurs établissements viennois et c'est là qu'il découvrira les écrits poétiques de RILKE pour lequel il ressentait un véritable coup de foudre. Stefan ZWEIG voyagera beaucoup, parcourant toute l'Europe, se liant d'amitié avec de nombreux écrivains, parcourant l'Inde, les Etats-Unis, le Canada et l'Amérique du Sud. Ces périples à l'étranger lui feront découvrir de nombreux auteurs et rendront plus forte encore sa passion pour les lettres françaises qu'il fera ensuite connaître à l'extérieur. Ayant pris très vite conscience du danger que représentait Adolf HITLER, l'écrivain avait choisi très vite de s'exiler. Il se rendra dans un premier temps en Angleterre, vivant d’abord à Londres, puis à partir de 1939 à Bath avant de gagner le Brésil. inquiet sur l'avenir de l'Autriche et devant la montée du nazisme, il choisira de rester en Angleterre et obtiendra en 1940 la citoyenneté britannique. Selon certains observateurs, c'est à la suite des coupures de gaz décidées à Vienne pour empêcher ses coreligionnaires de se suicider qui sera la goutte d'eau faisant déborder le vase. Avant de se donner la mort, il laissera cependant une lettre dans laquelle il livrera ses états d'âme.

    « Avant de quitter la vie de ma propre volonté et avec ma lucidité, j’éprouve le besoin de remplir un dernier devoir : adresser de profonds remerciements au Brésil, ce merveilleux pays qui m’a procuré, ainsi qu’à mon travail, un repos si amical et si hospitalier. De jour en jour, j’ai appris à l’aimer davantage et nulle part ailleurs je n’aurais préféré édifier une nouvelle existence, maintenant que le monde de mon langage a disparu pour moi et que ma patrie spirituelle, l’Europe, s’est détruite elle-même. Mais à soixante ans passés il faudrait avoir des forces particulières pour recommencer sa vie de fond en comble. Et les miennes sont épuisées par les longues années d’errance. Aussi, je pense qu’il vaut mieux mettre fin à temps, et la tête haute, à une existence où le travail intellectuel a toujours  été la joie la plus pure et la liberté individuelle le bien suprême de ce monde.          

    Je salue tous mes amis. Puissent-ils voir encore l’aurore après la longue nuit ! Moi je suis trop impatient, je pars avant eux. »

    Lettre d'une inconnue et 24 heures dans la vie d'une femme restent encore aujourd'hui parmi les oeuvres majeures de cet écrivain.

     

    Yahoo!

    votre commentaire
  • Août 1944, Provence... L'autre débarquement 

    Août 1944, Provence... L'autre débarquement

    Si le débarquement de Normandie de juin 1944 reste celui qui aura assommé les troupes nazies, celui des Français d'Août 1944, en Provence, deux mois après le premier, sera celui qui sonnera le coup de grâce ! D'autant qu'après l'humiliation de Juin 1940, l'armée française avait une revanche à prendre et l'idée de prendre les Allemands en tenaille avait fait son chemin depuis 1943. Malgré celle de Winston CHURCHILL qui aurait préféré déployer une force à d'autres endroits qu'en Provence et notamment dans les Balkans. Ce débarquement de Provence d'août 1944 méticuleusement préparé pendant de longs mois, les troupes nazies s'y attendaient puisque des dispositions avaient été prises. Dispositions qui avaient conduit les Allemands à faire évacuer le littoral en réquisitionnant au besoin certaines habitations, en coupant les arbres et en préparant un terrain où ils feront déposer des mines et concevoir des blockhaus. 

    C'est le général américain Alexander PATCH (photo ci-contre) à la tête de la 7ème armée américaine qui aura la redoutable mission d'encadrer toutes les troupes de ce débarquement de Provence composées en grande partie de Français revanchards conduits par le général de LATTRE de TASSIGNY (ci-dessous). Et cela dès 8h15 du matin de ce 15 août 1944. Autour d'éléments constitués de soldats de la France Libre qui avaient rejoint l'Afrique et aussi de forces d'Afrique comme les tirailleurs sénégalais ou de certains combattants venus d'Algérie, de Tunisie ou du Maroc. Pour la première fois depuis mai 1940, une armée française se battra sur le sol national après avoir été entraînée à le faire durant de longs mois en Afrique et ailleurs ! Sa tâche sera facilitée par la Résistance locale laquelle, alertée, mettra tout en oeuvre pour faciliter ce débarquement en se livrant à des actions de sabotage destinées à couper les voies de communication : dynamitage de ponts et de voies de chemin de fer. Des sabotages appuyés par un pilonnage incessant d'avions alliés qui ne parviendra pas à avoir raison du moral retrouvé de toutes les victimes de ces bombardements.

    Août 1944, Provence... L'autre débarquementDes centaines et des centaines de bateau à perte de vue venant d'un peu tous les horizons ! Aussi bien d'Afrique du Nord que de l'Italie voire même de Corse ou de Sardaigne ! Et, devant eux une absence remarquée de forces nazies qui avaient été déplacées vers la Normandie offrant aux acteurs de ce débarquement un terrain propice qu'ils sauront exploiter avec l'aide d'une dizaine de milliers de parachutistes largués dès l'aube le 15 août ! Des ilots de résistance allemande combattront jusqu'au 19 août à Marseille malgré un ordre de repli donné. Il faudra attendre le 28 août pour que Marseille soit libérée grâce au commandement d'un général de Monsabert qui aura su conduire ses hommes à la victoire. Le 12 septembre suivant, à Dijon, s'effectuera la jonction entre les troupes venues de Normandie et celles provenant de ce débarquement. 

    Yahoo!

    votre commentaire
  • Georges Mandel, pour venger la mort d'Henriot

    Il fallait venger la mort de Philippe HENRIOT et donc assassiner un homme qui avait représenté tout ce que la junte vychiste au pouvoir exécrait. De son statut de juif jusqu'à celui de Résistant. C'est du moins la version officielle d'un acte que certains autres attribuent comme l'écrivain et historien François DELPLA à Adolf HITLER lui-même qui était désireux de se venger d'un homme qui s'était toujours élevé contre le nazisme dès le début des années trente. C'est d'ailleurs lui qui s'était élevé à la tribune de la Société des Nations contre le rétablissement en Allemagne  nazie du service militaire obligatoire. Promu ministre de l'Intérieur du 18 mai au 16 juin 1940 dans le dernier gouvernement de Paul REYNAUD avant la prise de pouvoir du Maréchal PETAIN, c'est lui qui fera arrêter certains intellectuels favorables à l'Allemagne nazie parmi lesquels les rédacteurs du magazine Je suis partout. Il aura une influence directe dans la nomination de Charles de GAULLE au poste de sous secrétaire d'Etat à la guerre en juin 1940. très proche de REYNAUD et animant à ses côtés le camp de la fermeté, il plaidera au Conseil des ministres qui se tiendra au château de Cangé le 13 juin 1940 pour une résistance à tout prix. Opposé au général WEYGAND, et persuadé que la France pouvait résister à l’Allemagne grâce à son Empire et son alliée l’Angleterre, il s’embarquera le 20 juin 1940 sur le Massilia dans le but de continuer la lutte. Il semblait alors qu’il se tenait prêt à être l’homme du refus de l'armistice et il apparut durant quelques jours, comme celui qui pouvait incarner le sursaut. Il perpétuait il est vrai l’esprit de CLEMENCEAU dont il avait été le plus proche collaborateur en 1917. Suite à la signature de l’armistice, il sera alors accusé de trahison par le gouvernement dirigé par PETAIN. Parti en Afrique du Nord pour échapper aux Vychistes, il sera néanmoins à nouveau arrêté au Maroc le 8 août 1940 puis, condamné à la prison à vie à Riom, incarcéré au Château de Chazeron avec Edouard DALADIER, Paul REYNAUD et le général Maurice GAMELIN. 

    Après son arrestation en août 1940 et son emprisonnement au Fort du Portalet, Georges MANDEL sera déporté à Sachsenhausen puis à Buchenwald en 1943, dans la maison du fauconnier, réservée aux personnalités, où se trouvait déjà Léon BLUM. Il avait pourtant tenté d'alerté PETAIN sur sa condition de prisonnier mais sans pour autant recevoir de réponse du vieux maréchal. « Me maintenir au Portalet quand la France entière va être occupée équivaut à me livrer à l’ennemi. Je tiens à ce que vous soyez averti afin qu’il soit bien établi devant l’Histoire que vous serez éventuellement responsable de ce crime ». Les Allemands finiront par le livrer à la Milice de DARNAND et le milicien MANSUY qui appartenait également à la SIPO-SD nazie l'abattra le 7 juillet 1944 de neuf balles dans le dos dans la forêt de Fontainebleau. Selon le témoignage de Fernand de BRINON à la Libération, « La livraison de MANDEL était une décision d’HIMMLER, transmise par Karl OBERG, le chef de la police allemande en France. Une mesure prise en représailles de l’assassinat du collabo Philippe HENRIOT ». Après l'exécution de Georges MANDEL, d'autres plans avaient été arrêtés et notamment l'exécution de responsables comme Paul REYNAUD et Léon BLUM.

    Georges Mandel, tué pour venger la mort d'HenriotNé Louis ROTHSCHILD le 5 juin 1885, Georges MANDEL s'était fait connaître en devenant le chef de cabinet de Georges CLEMENCEAU en 1917 après avoir été journaliste à l'Aurore. Juif, ses parents avaient dû fuir l'Alsace annexée à l'Empire allemand en 1871 pour conserver la nationalité française. Soucieux d'apparaître comme quelqu'un qui n'avait rien à voir avec les banquiers du nom de ROTHSCHILD, il avait rapidement choisi de changer de nom empruntant le patronyme de son oncle maternel Louis MANDEL. Il n’avait pourtant aucun lien de parenté avec les banquiers mais ce hasard ouvrira un large champ aux attaques antisémites qu'il aura à supporter. Brillant, lucide, influent, courageux, énergique, combatif, paradoxal, orgueilleux, il mettra quelques années à obtenir les postes auxquels ses qualités et sa réputation auraient pourtant dû le conduire. On dira que MANDEL aurait été rongé par le doute de soi et qu'il ne s’aimait pas parce qu'il était laid. « Tout dans son comportement nous indique qu’il n’était pas réconcilié avec l’apparence physique que le nature lui a donnée (…) Sa laideur fait l’objet, parmi ses contemporains, d’une rare unanimité ». Ministre de l'Intérieur du dernier gouvernement de la IIIe République, cette prise de fonctions éphémère sera le couronnement d'une carrière commencée à vingt et un ans, en 1906, année où ce fils de riches commerçants parisiens était entré en politique comme d'autres entrent en religion. Il était entré au Parlement en 1919 comme député de la Gironde et était devenu ministre en 1934. Soixante après sa mort, sa mémoire n’a pas laissé beaucoup de traces : une avenue à Paris, une stèle au bord de la nationale 7 en forêt de Fontainebleau. Les gaullistes l’ignorent, l’extrême droite le poursuit toujours de sa haine ; à gauche, il n’est pas de la famille. Pour Joël DROGLAND, agrégé d'histoire, « L’homme solitaire qui manqua de si peu la grande Histoire est resté sur le quai, noble et très pathétique ». A l'écran, dans un film de Claude GORETTA : Le dernier été (ci-dessous), c'est le comédien Jacques VILLERET qui lui prêtera ses traits.

     

    Yahoo!

    votre commentaire