• Henri Fertet, lycéen et résistant, il sera abattu à 17 ans par les nazis

    Henri Fertet, le lycéen et résistant abattu par les nazisCe 26 septembre-là de l'année 1943, c'était un dimanche comme les autres. Un dimanche où, pourtant, l'espoir revenait progressivement. Surtout depuis que l'on savait qu'un prochain débarquement était en préparation qui sonnerait la fin du diktat nazi. Hélas, ce dimanche sera aussi le dernier vécu par le jeune Henri FERTET (ci-contre) qui venait d'être arrêté et condamné à mort.

    Henri FERTET, né le 27 octobre 1926 à Seloncourt, dans le Doubs, était un jeune résistant français. Fils d'un instituteur, cet adolescent passionné d'histoire et d'archéologie avait été baptisé à Verdun le 15 mai 1927. Engagé dans la Résistance au sein d'une mouvance FTP et auteur de plusieurs faits d'arme, dénoncé, il sera arrêté puis fusillé le dimanche 26 septembre 1943 à Besançon. Quelque temps auparavant, après avoir aidé un prisonnier polonais, il avait attaqué un commissaire des douanes allemand et il l'avait mortellement blessé. Il sera promu Compagnon de la Libération et fait chevalier de la Légion d'Honneur à titre posthume. De lui, il reste ce témoignage émouvant destiné aux siens qu'il rédigera avant d'être fusillé par les nazis avec quinze de ses camarades. Une lettre qui montre quel était le prix qu'il donnait à son engagement et quel était son amour pour cette France libre qu'il a si bien servie.

    Chers parents,

    Ma lettre va vous causer une grande peine, mais je vous ai vus si pleins de courage que, je n’en doute pas, vous voudrez bien encore le garder, ne serait-ce que par amour pour moi.

    Vous ne pouvez savoir ce que moralement j’ai souffert dans ma cellule, [ce] que j’ai souffert de ne plus vous voir, de ne plus sentir sur moi votre tendre sollicitude que de loin. Pendant ces quatre-vingt-sept jours de cellule, votre amour m’a manqué plus que vos colis et, souvent, je vous ai demandé de me pardonner le mal que je vous ai fait, tout le mal que je vous ai fait. Vous ne pouvez douter de ce que je vous aime aujourd’hui, car avant, je vous aimais par routine plutôt mais, maintenant, je comprends tout ce que vous avez fait pour moi. Je crois être arrivé à l’amour filial véritable, au vrai amour filial. Peut-être, après la guerre, un camarade parlera-t-il de moi, de cet amour que je lui ai communiqué ; j’espère qu’il ne faillira point à cette mission désormais sacrée. Remerciez toutes les personnes qui se sont intéressées à moi, et particulièrement mes plus proches parents et amis, dites-leur toute ma confiance en la France éternelle. Embrassez très fort mes grands-parents, mes oncles, mes tantes et cousins, Henriette. Dites à M. le Curé que je pense aussi particulièrement à lui et aux siens. Je remercie Monseigneur du grand honneur qu’il m’a fait, honneur dont, je crois, je me suis montré digne. Je salue aussi en tombant mes camarades du lycée. À ce propos, Hennemay me doit un paquet de cigarettes, Jacquin, mon livre sur les hommes préhistoriques. Rendez le “Comte de Monte-Cristo” à Emeurgeon, 3, chemin Français, derrière la gare. Donnez à Maurice Andrey de La Maltournée, 40 grammes de tabac que je lui dois. Je lègue ma petite bibliothèque à Pierre, mes livres de classe à mon cher Papa, mes collections à ma chère maman, mais qu’elle se méfie de la hache préhistorique et du fourreau d’épée gaulois.

    Je meurs pour ma patrie, je veux une France libre et des Français heureux, non pas une France orgueilleuse et première nation du monde, mais une France travailleuse, laborieuse et honnête. Que les Français soient heureux, voilà l’essentiel. Dans la vie, il faut savoir cueillir le bonheur. Pour moi, ne vous faites pas de soucis, je garde mon courage et ma belle humeur jusqu’au bout et je chanterai “Sambre et Meuse” parce que c’est toi, ma chère petite maman, qui me l’a appris. Avec Pierre, soyez sévères et tendres. Vérifiez son travail et forcez-le à travailler. N’admettez pas de négligence. Il doit se montrer digne de moi. Sur les “trois petits nègres”, il en reste un. Il doit réussir.

    Les soldats viennent me chercher. Je hâte le pas. Mon écriture est peut-être tremblée, mais c’est parce que j’ai un petit crayon. Je n’ai pas peur de la mort, j’ai la conscience tellement tranquille. Papa, je t’en supplie, prie, songe que si je meurs, c’est pour mon bien. Quelle mort sera plus honorable pour moi ? Je meurs volontairement pour ma Patrie. Nous nous retrouverons bientôt tous les quatre au ciel. Qu’est-ce que cent ans ? Maman rappelle-toi : “Et ces vengeurs auront de nouveaux défenseurs Qui, après leur mort, auront des successeurs.” Adieu, la mort m’appelle, je ne veux ni bandeau, ni être attaché. Je vous embrasse tous. C’est dur quand même de mourir. Mille baisers. Vive la France. Un condamné à mort de 16 ans.

    H. Fertet.

    Excusez les fautes d’orthographe, pas le temps de relire.

    Yahoo!

    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :